Les aptitudes “tout terrain” de la Citroën 2 CV ont souvent conduit ses utilisateurs à abuser des chevauchées dans les chemins semés d’ornières. Pour peu qu’on ait par trop imposé ce genre de tortures à une voiture chargée au maximum (ce qui signifie en surcharge dans bien des cas), ses trains roulants sont certainement en mauvais état.
Or, on méconnaît trop l’importance de ces organes dans la sécurité d’une automobile ; à preuve : le nombre anormal de voitures qu’on trouve, avachies sur le bas-côté, avec un bras de suspension ou un moyeu brisé.
L’acheteur d’une 2 CV dont on ne connaît pas bien la vie antérieure sera donc bien avisé de procéder à un examen soigneux des essieux, surtout si l’état général de la voiture trahit un manque de soins évidents de la part de son (ou de ses) propriétaire(s) précédent(s). Levez la voiture au maximum pour la caler sur des chandelles, roues pendantes. Procédez à l’examen d’un côté, puis passez à l’autre. L’idéal étant de pouvoir hisser (à l’aide d’un cric rouleur) la voiture sur une espèce de “pont”, réalisé en posant deux robustes chevrons sur deux solides tréteaux.
Commencez par tâter le jeu dans le moyeu de chaque roue : saisissez-la à pleines mains suivant un diamètre horizontal et tentez de la faire jouer en tirant et poussant de droite et de gauche ; recommencez l’opération en tenant la roue selon un diamètre vertical. Si vous percevez du jeu, et surtout s’il s’accompagne d’un “clac-clac” bien audible, il faut rénover le moyeu, c’est-à-dire remplacer ses deux roulements à rouleaux.
Après avoir examiné le moyeu de roue, faites de même avec le palier d’articulation du bras de suspension. Pour cela, déposez la roue et saisissez l’extrémité du bras juste derrière le moyeu de roue ; poussez et tirez pour tenter de le faire jouer dans son plan de symétrie : si vous y arrivez, le palier du bras doit être rénové.
Bien entendu, il faut également examiner les bras pour y déceler éventuellement la trace d’un choc qui peut l’avoir faussé. Un bras faussé détériore le comportement de la voiture, surtout à pleine charge (mais un léger vrillage ne se ressent guère sur une 2 CV) et induit une usure anormale du pneu de la roue correspondante. Dans ce cas, il n’existe pas d’autre solution que de remplacer le bras endommagé, en essayant d’abord de s’en procurer un chez un récupérateur.
La suspension avant à bras “poussés” de la 2 CV n’a jamais été utilisée par aucun autre constructeur. Compte tenu des performances modestes, du grand débattement de la suspension et de l’interconnexion avant-arrière, cette solution n’a jamais posé de problèmes. Elle offre l’avantage d’un poids mort non suspendu relativement modéré, et surtout d’une simplicité (gage de robustesse et de longévité) qui facilite les réparations.
Jeux fonctionnels |
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• Le démontage complet du train avant nécessite le désaccouplement de la direction ; cette opération ne s’impose qu’en cas d’intervention sur la direction également (ce qui nécessite alors de déposer complètement la traverse tubulaire). Mais on se contente le plus souvent de déposer seulement les bras de suspension.
Couples de serrage (m.daN) |
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• Dans ce cas, déposez d’abord l’aile, puis la roue du bras sur lequel vous voulez intervenir. Si la voiture est équipée d’une barre antiroulis, déposez celle-ci, ainsi que ses paliers. Déposez le support de l’amortisseur sur le bras. Si vous intervenez sur le bras avant gauche, défaites la bride du tube d’échappement sur le silencieux.
• Relevez la languette de la rondelle-frein sur l’écrou de la rotule fixant la barre d’accouplement de direction sur le moyeu, défaites cet écrou et déposez la barre. Déposez l’écrou de moyeu et sortez l’arbre de transmission hors du moyeu.
• Calez le bras, à l’aide du cric par exemple (ou d’un morceau de bastaing à la longueur appropriée) et tracez des repères sur les positions respectives de la tringle de liaison du bras avec le pot de suspension. Désaccouplez les éléments de suspension du bras. Si la voiture est un modèle équipé de batteurs à inertie, déposez celui du bras à rénover.
• Chassez le chapeau qui ferme le palier du bras, en faisant levier à l’aide d’un tournevis. Puis, avec une pince à becs coudés, retirez la goupille fendue qui freine la bague-écrou crénelée (encore appelée “écrou à encoches”).
• Pour déposer cette bague, il faut utiliser une clé spéciale avec douille à ergots.
• Le bras doit alors s’extraire de son articulation en le tirant vers l’extérieur ; s’il résiste, tapotez derrière avec un maillet. Ôtez la bague du roulement interne qui est restée sur l’extrémité du tube et déposez également l’autre roulement, qui est dans le moyeu du bras. Nettoyez l’intérieur de ce moyeu, ainsi que le palier à l’extrémité de la traverse tubulaire, à l’aide d’un chiffon imbibé de trichloréthylène ou d’alcool dénaturé.
La procédure de remontage suit exactement l’ordre inverse du démontage. Garnissez les roulements neufs de graisse à roulements (sans excès cependant) et montez systématiquement des joints d’étanchéité neufs, en veillant bien à les positionner dans le bon sens. Lors du remontage des rotules de la barre d’accouplement et de la tringle du pot de suspension, graissez également les éléments d’articulations.
Lors du remontage des bras d’essieu avant, il faut remplacer systématiquement les joints d’étanchéité. Veillez à placer correctement le joint d’étanchéité (j) sur la portée de la traverse, avant de monter la bague interne du roulement : la lèvre biseautée doit se trouver à l’opposé de la bague du roulement.
La suspension arrière à bras tirés présente une architecture à peu près symétrique de celle de l’avant. A noter que la tuyauterie des freins est lovée en forme hélicoïdale à l’intérieur de la traverse tubulaire. Sur une 2 CV fréquemment chargée au maximum, les articulations des bras souffrent énormément ; il arrive également qu’un bras trop souvent amené à talonner en butée, finisse par se fausser. Le contrôle de la géométrie des bras nécessite un outillage particulier : mieux vaut les remplacer au moindre doute.
Couples de serrage (m.daN) |
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À l’arrière, les opérations sont beaucoup plus simples, puisque les roues ne sont ni directrices, ni motrices. Toutefois, il faut ici démonter le raccord de la tuyauterie de freins, ce qui nécessitera de refaire ensuite le plein du circuit et de le purger.
• Lors de cette opération, placez un récipient sous le raccord pour y récupérer le liquide qui s’échappera lorsque vous le desserrerez (ne réutilisez pas ce liquide). Obturez les tuyauteries déposées, soit en y insérant une vis du diamètre correspondant, soit en les encapuchonnant de morceaux de plastique maintenus par des bracelets en caoutchouc.
• Ensuite, vous déposerez le bras de suspension, puis les roulements de son palier, exactement comme dans le cas des bras avant. Ici aussi, graissez les roulements avant de les monter, avec des joints neufs dont les lèvres doivent être tournées à l’opposé du roulement qu’ils protègent.
• Lorsque vous replacez la tuyauterie de freins à l’intérieur de la traverse tubulaire, assurez-vous de lui laisser un espace suffisant pour qu’elle ne frotte pas à l’intérieur du tube.
Une clé spéciale de fortune |
Vous pouvez vous confectionner une clé spéciale à douille à ergots, pour desserrer et rebloquer les bagues-écrous à encoches des paliers de bras et des moyeux. Prenez un morceau de tube robuste (tube de chauffage central par exemple), du diamètre correspondant à la bague-écrou, et taillez une douille d’une hauteur suffisante pour dépasser le logement de cet écrou sur environ 30 à 35 mm. Percez, selon un diamètre, deux trous opposés de Ø 11 mm, centrés à 20 mm d’une des extrémités de cette douille (pour y passer une tige de Ø 10 mm. A l’autre extrémité, découpez deux ergots diamétralement opposés, de largeur et profondeur correspondant à celles des créneaux, en donnant deux traits de scie parallèles, puis en ôtant le reste du métal par meulage. ébavurez les rebords à la lime. |
Profitez de cette opération pour vous assurer de l’état des tuyauteries de freins. La dépose du bras sera plus facile si vous l’allégez en déposant au préalable le tambour de frein. Pensez alors à remplacer les garnitures si elles approchent de leur limite d’usure : vous vous éviterez une nouvelle dépose. Vérifiez les fixations de la traverse tubulaire sous la caisse, ainsi que l’état des butées de débattement des bras de suspension.